De Mélanie C. (Seine-Saint-Denis) « Puis-je bénéficier du régime protecteur du droit de la consommation ? »
La question : « J'ai reçu la visite d'un démarcheur qui m'a fait signer un bon de commande d'une caisse enregistreuse avec des paiements mensuels de 160 euros. Je n'ai pas compris sur le moment mais, en réalité, il m'a fait signer un contrat de location auprès d'une société de financement pour 5 ans, la caisse me coûte en réalité 9 600 euros. Après coup, mes confrères m'ont indiqué que le prix du matériel que je venais d'acquérir était extrêmement élevé et que je ne peux apparemment pas me rétracter. Que puis-je faire ? »
Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.
La réponse de Me Verdier :
Avant toute chose, je vous recommande de ne jamais signer de contrat dès la première visite du démarcheur. Vous devez prendre un temps de réflexion, sinon vous risquez de vous engager de manière irrévocable pour de nombreuses années. Des commerciaux peu scrupuleux viennent directement dans vos locaux pendant les heures de vente et vous poussent à signer un contrat qui porte différents noms comme « proposition commerciale » ou « étude ».
En réalité, ils vous font aussi signer un contrat de location avec un organisme financier, contrat qui est souvent dissimulé ou noyé dans un flot de documents. Et bien souvent, vous ne découvrez l'existence du financeur qu'après la livraison du bien. Vous pensez avoir acquis un bien à une entreprise donnée alors que vous n'êtes que locataire et devez finalement payer les loyers au financeur qui a versé l'intégralité du prix au fournisseur.
Or, si le bien est défectueux ou que vous souhaitez simplement vous rétracter, votre premier réflexe sera de suspendre le paiement des loyers. Cette réaction n'a toutefois aucune incidence à l'égard du fournisseur du matériel qui a déjà perçu le prix de son bien des mains du financeur. Quant à l'organisme financier, lui, n'acceptera jamais de renoncer au paiement des loyers. Le fournisseur, comme la société de financement, sont protégés par les contrats qui prévoient que les éventuels problèmes liés au matériel ne sont pas opposables au financeur, les contrats étant indépendants.
Quoiqu'il arrive, vous devrez payer l'intégralité des loyers jusqu'au terme du contrat de location.
? Comment vous sortir de cette situation ? La réponse dépend du bien ou du service que vous avez acheté. En effet, les dispositions protectrices du code de la consommation sont applicables lorsque l'objet du contrat n'entre pas dans le champ de l'activité principale de l'entreprise sollicitée, dès lors qu'il s'agit d'une personne physique ou morale dont le nombre de salariés est inférieur ou égal à 5 (Article L.221-1 du Code de la consommation). Dans ce cas, vous bénéficiez d'un droit de rétractation de 14 jours à compter de la signature du contrat sans avoir à motiver votre décision, ni à supporter d'autres coûts que ceux de réacheminement du bien. Afin de faciliter l'exercice du droit de rétractation, le contrat doit comprendre un formulaire détachable comprenant certaines mentions énumérées à l'article R. 221-2 du Code de la consommation. Très important : il convient de savoir que « lorsque les informations relatives au droit de rétractation n'ont pas été fournies au consommateur (…) le délai de rétractation est prolongé de douze mois à compter de l'expiration du délai de rétractation initial » (Article L.221-20 du Code de la consommation).
? Comment déterminer si le contrat que vous avez conclu rentre dans le champ d'activité de votre commerce ? Vous n'êtes pas protégés si les contrats signés ont pour objet la promotion ou le développement de l'activité professionnelle. En revanche, le régime du droit de la consommation est appliqué aux contrats de vente portant sur des produits ou services qui ne sont pas de nature à développer ou promouvoir l'activité, quand bien même ils sont utilisés dans le cadre de cette activité. Par exemple, il a été jugé que n'a aucun rapport direct avec l'activité professionnelle du démarché l'offre faite à des boulangers par une entreprise de désinsectisation et de dératisation des locaux (CA Paris, 13e ch., 8 nov. 1999, n° 98/08327) ou encore l'installation d'un système d'alarme dans le magasin d'un commerçant exploitant un commerce de détail de vêtements (Cass. 1 re civ., 25 mai 1992, n° 89- 15.860, n° 806 P + F).
? En ce qui vous concerne, l'achat d'une caisse enregistreuse comme d'un four ou un pétrin représente bien un achat professionnel qui va servir pour les besoins de votre commerce. Le contrat que vous avez signé est donc a priori définitif dès la conclusion du contrat. Sachez toutefois que la société de financement ne peut encaisser les loyers qu'à partir du moment où vous avez réceptionné le matériel et signé le procès-verbal de livraison et de conformité. Si vous avez un litige avec le fournisseur, vous pouvez refuser la livraison du matériel en dénonçant les pratiques de vente par LRAR.
? Que faire si vous êtes assigné en paiement des loyers ? L'assistance d'un avocat vous sera indispensable. Seule l'intervention forcée du fournisseur permettra de discuter de la qualité de la prestation fournie et d'essayer de remettre en question le contrat de financement. Diverses solutions de défense au cas par cas sont alors possibles parmi lesquelles l'annulation du contrat du financeur découlant de l'annulation du contrat fournisseur. Le contrat avec le fournisseur peut être en effet annulé du fait de l'inexécution contractuelle du fournisseur (si le matériel est défectueux par exemple) ou en apportant la démonstration de l'existence de manoeuvres dolosives qui ont conduit à la signature du contrat.
Le conseil Ne signez jamais de contrat dès la première visite du démarcheur et sans temps de réflexion. Lorsque vous signez un contrat, faites bien attention aux engagements qu'il comporte, notamment sur la durée et les possibilités de rétractation.
Pour accéder à l'ensembles nos offres :